Il y a des objectifs qui peuvent prendre 1000 ans à être atteint…
C’est en tout cas ce qu’on pourrait penser du combat perpétuel visant à éradiquer les inégalités entre les femmes et les hommes. Même si des politiques mises en place dans la sphère professionnelle engagent à davantage de transparence pour atteindre cette égalité, ce tabou a encore de belles années devant lui.
Mais outre les diverses lois nécessaires pour répondre à cet enjeu, la mobilisation des entreprises est désormais indispensable pour faire progresser la démarche égalitaire.
L’emploi des femmes : L’ennemi numéro 1 des écarts de rémunération
La crise a révélé au grand jour les inégalités entre les femmes et les hommes. De nouvelles sont apparues, fondées en particulier sur le développement du temps partiel. Auparavant, la pauvreté était corrélée principalement au chômage. Maintenant, on peut avoir un emploi et être en situation de pauvreté, ce qui est particulièrement le cas des femmes étant à temps partiel et ayant de faibles salaires horaires. Entre 1975 et 2000, le taux d’emploi en temps partiel a été multiplié par deux, passant de 8,3 % à 17,3 %. Depuis une vingtaine d’années, il évolue peu mais au cœur de cette stagnation, 76 % des temps partiels sont occupés par les femmes. L’économiste Françoise Milewski met en lumière les conséquences économiques de la pandémie sur l’emploi des femmes, amplifiant leur précarité et renforçant les inégalités femmes-hommes au travail.
Face à ce contexte, il faut également mettre en perspective celui de la ségrégation professionnelle. D’après l’Insee, seules trois professions parmi les vingt les plus courantes sont communes aux femmes et aux hommes (nettoyeurs, employés de libre-service du commerce, aides de cuisine). Les professions liées à la santé et à l’action sociale constituent une part importante de l’emploi féminin, alors que les hommes sont davantage regroupés dans les métiers liés à la construction, au transport et à l’entreposage. Ce stéréotypage des métiers s’accompagne également d’inégalités au niveau hiérarchique et d’accès au poste les mieux rémunérés : 22,8 % des postes occupés par les hommes correspondaient à des emplois de cadres en 2017, contre 17,5 % pour les femmes. Pour les hommes, trois professions parmi les vingt les plus fréquentes correspondent à des emplois de cadres, contre une seule pour les femmes. Parmi ces emplois de cadres pour les hommes, deux correspondent à des activités liées à l’informatique, secteur très masculin dès les filières d’études. Il est alors avéré que l’orientation scolaire, différenciée selon le sexe, est en mesure d’avoir des effets à long terme sur les emplois occupés et, au final, sur les inégalités salariales.
Index égalité ou égalité mise à l’index
Instauré par la loi « Pour la liberté de choisir son avenir professionnel » du 5 septembre 2018, l’index égalité vise à mesurer et corriger les écarts de rémunération dans les entreprises. Avec cet outil, les entreprises passent d’une obligation de moyens à une obligation de résultats, moyennant sanctions si les objectifs ne sont pas atteints. Selon une étude du ministère du Travail en 2019, réalisée auprès de 40 000 entreprises françaises de plus de 50 salariés, seules 6 % des entreprises versent des salaires égaux à leurs employés. Pour les entreprises de 1 000 salariés, seules 1 % d’entre elles sont exemplaires.
Cet index est probablement une avancée permettant l’établissement d’indicateurs, mais ne changent pas les choses en profondeur. Il ne s’attaque ni aux freins ni aux barrières, évitant ainsi les questions de fond. De l’objectif initial au travers d’une loi d’instaurer un logiciel permettant d’identifier l’ensemble des problématiques salariales, la ministre du Travail opérait un virage en 2018 aboutissant à une méthodologie discutable, basée sur des critères perfectibles, pouvant permettre à des entreprises de se mettre à l’abri des sanctions même en cas d’inégalités avérées. Alors qu’il y a urgence à agir, il y a un risque d’installation d’un immobilisme forcé, dont la cause est double. D’une part, il est relativement facile d’obtenir une « bonne » note. D’autre part, la méthode de calcul de l’index égalité a pour effet de masquer une grande partie des écarts de rémunération.
Force Ouvrière avait pourtant proposé la mise en place d’un outil national garantissant simplicité, transparence et égalité de traitement. Et on peut constater que même au travers des lois, des accords ou directives, les faits sont encore bien trop présents, souvent consternants, et où la perception de chacun se trouve biaisée par des effets d’annonces. L’égalité professionnelle est-elle réellement si compliquée à obtenir ?
Un bilan de l’index égalité doit être fait sans concession. Nous revendiquons sa révision et son amélioration afin qu’il permette d’aboutir réellement à l’égalité salariale. Nous sommes également favorables à des indicateurs plus larges sur la proportion de femmes parmi les bas niveaux de classification et les 10 % de salaire les moins élevés.
Pour FO, c’est par la négociation et la mobilisation que les évolutions accomplies sont importantes, l’égalité étant un volet constituant les Négociations Annuelles Obligatoires dans les entreprises. La réussite de droits nouveaux pour les femmes, c’est aussi en gagner pour tous ! Articuler les temps et agir pour infléchir la flexibilité des temps ancrée dans notre société, ou bien rendre accessibles aux femmes certains postes en aménageant ces derniers permettent l’amélioration des conditions de travail de toutes et tous.
le saviez-vous ?
Le 8 novembre dernier, la France a ratifié la Convention n° 190 de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) relative à l’élimination de la violence et du harcèlement dans le monde du travail (dont la violence fondée sur le genre).
Depuis son adoption par l’OIT à l’occasion de son centenaire en 2019, Force Ouvrière, aux côtés de la Confédération Syndicale Internationale (CSI) et la Confédération européenne des syndicats (CES), n’a cessé d’inciter la France à procéder au plus vite à sa ratification.
Nous prenons acte de la promulgation de cette loi et appelons le gouvernement français à faire preuve dès maintenant d’ambition en allant au-delà du droit national existant afin de créer de nouveaux droits. FO sera vigilante, dans le cadre du suivi régulier de la convention par les organes de suivi et de contrôle de l’OIT, à ce que la législation et la pratique nationale soient par ailleurs en conformité avec la convention. En effet, comment les mesures législatives actuelles pourraient-elles suffire alors que les déclarations de violences sexistes et sexuelles au travail continuent de progresser ?