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Le facteur, acteur du Service public de demain !

Alors que la dématérialisation des démarches administratives est prévue pour fin 2022, les communautés de commune cherchent de nombreuses solutions pour lutter contre l’isolement de certains de leurs administrés en matière de numérique.

Quelles que soit les difficultés rencontrées, pas d’accès aux outils, incompréhension du « jargon » informatique, désarroi face à une telle évolution, l’une des solutions est de mettre en place des « ateliers » de formation. Et qui mieux que le facteur, acteur de proximité et apprécié de la population, pour jouer le rôle indispensable de médiateur entre personnes désarmées et organisateurs de ces ateliers ?

Près de Toulouse, c’est le choix qui a été fait : le facteur remet, au nom de la commune, un questionnaire à ses clients afin de réaliser une étude et recenser les besoins de la population en la matière.

Pour La Poste, c’est un moyen de maintenir le passage du facteur. A l’heure où la lettre à distribuer se fait de plus en plus rare, les nouveaux services sont les bienvenus.

Pour FO Com, ces nouveaux services doivent s’inscrire dans les missions de Service public et donc dans la raison d’être de La Poste. Facteur de cohésion sociale, la lutte contre la fracture numérique telle que pratiquée près de Toulouse répond à ces critères. Bien évidemment La Poste doit se donner les moyens humains et financiers pour que ces nouvelles activités ne soient pas qu’un épiphénomène mais bien une évolution salutaire pour la pérennité du métier de facteur.

Ne pas faire n’importe quoi à n’importe quel prix mais répondre aux besoins des citoyens… Le Service public tout simplement.

Au courrier – Quand évolution rime avec dégradation…

La Poste est une entreprise emblématique dans le paysage économique français qui a toujours vanté son modèle social et son rôle d’entreprise citoyenne ; une entreprise qui se veut proche des français avec son facteur toujours prêt à rendre service et son guichetier toujours souriant. Mais aujourd’hui, derrière ces images d’Épinal, la réalité est toute autre.

facteur-dossierLa Poste, une entreprise en profonde mutation

transformée en société anonyme en 2010, La Poste doit toujours assurer ses missions de service public, missions par définition « non rentables » ce qui est déjà une première difficulté dans la mesure où l’État se désengage de plus en plus alors qu’il devrait au contraire en assumer le coût. A cela, s’ajoutent l’évolution technologique, l’explosion de l’utilisation du numérique et donc les changements de mode de vie qui mettent à mal les activités historiques. La chute drastique des volumes de courrier, la baisse continue de la fréquentation des bureaux de poste entraînent de massives suppressions d’emplois, y compris dans les services « supports ». Enfin, la concurrence de plus en plus agressive oblige La Poste à une constante remise en question de ses schémas industriels. Toutes ces raisons la poussent aujourd’hui à faire évoluer ses missions, à réfléchir à la mise en place de nouvelles activités et à revoir son modèle social. L’enjeu, de taille, est principalement porté par les postiers eux-mêmes à qui on demande une « adaptation » permanente.
Entre 2007 et 2012, le courrier a globalement chuté de 20 % et la baisse s’est accentuée sur la période 2012-2018 en moyenne de 7 %. A l’inverse, le secteur du colis connait une augmentation d’environ 8 % par an. Cependant, cet « eldorado » attire de nombreux opérateurs, souvent low cost, dont Amazon, qui poussent La Poste à faire évoluer son organisation bien souvent au détriment du modèle social qu’elle prône. Ces évolutions ont entraîné de profonds changements pour les postiers de la distribution.

Quand transformation rime avec dégradation

Ainsi, depuis maintenant plusieurs années, les services connaissent d’incessantes réorganisations, des suppressions d’emplois et des ajustements à la charge qui, en plus d’engendrer des conditions de travail parfois déplorables, enlèvent tout sens au travail. Car le travail a un sens. Et plus particulièrement chez le facteur dont la mission va bien au-delà de la distribution du courrier. Jusqu’à il y a quelques années, sa tâche l’amenait au cours de sa tournée à privilégier le contact humain, l’échange, l’entraide… Or ce « temps social » n’existe plus dans les nouvelles organisations uniquement basées sur la productivité. Le facteur devient alors un distributeur, un automate qui met du papier dans une boîte ; un travail sans intérêt et de surcroît mal payé.
Cette perte de sens du travail est doublement ressentie chez les postiers fonctionnaires. Rentrés aux PTT, ils ont été formés au Service public avec des notions d’utilité, de service rendu et d’entraide gratuite loin des standards de rapidité, rentabilité, productivité, rendement qu’on leur impose aujourd’hui. Un schéma étranger à leur mode de fonctionnement social et surtout qui enlève tout l’intérêt du travail de postiers.
Le problème se pose autrement pour les salariés. Plus jeunes, la perception qu’ils ont de La Poste est différente. Arrivés dans l’entreprise sous statut privé, parfois « rôdés » aux périodes de chômage et de « galère sociale », ils sont plus réceptifs aux notions de concurrence et de rentabilité et perçoivent La Poste comme une entreprise dont la stabilité est encore d’actualité et où ils pourront peut-être « faire carrière ». Cependant, la question des salaires est prégnante et engendre un turn-over important voire des difficultés à recruter. Ceux qui acceptent la proposition d’embauche ont tendance à tout accepter au détriment de leurs conditions de travail et de sécurité, que ce soit des heures supplémentaires à outrance ou des primes dont la pérennité n’est pas garantie. Quant aux promotions, la complexité du système qui ne reconnait pas forcement les qualités professionnelles à leur juste valeur en décourage plus d’un.
Bien que ressenties de façon contraire, les difficultés sont les mêmes pour tous, que l’on soit salarié ou fonctionnaire et le constat commun est sans appel : salaires trop bas, charge de travail trop élevée, réorganisations incessantes exigeant une « adaptabilité » permanente, perte de sens du travail, pénibilité non prise en compte sont aujourd’hui le quotidien du facteur, du rouleur, de l’agent de cabine et de tous les personnels de la distribution.

Agents de la distri : véhiculer l’image de La Poste a un prix !

Les tournées de distribution ont toujours été contrôlées afin d’en voir l’évolution et ainsi adapter le temps à la charge et aux distances. Jusqu’alors, le vérificateur, chargé du contrôle, faisait la tournée avec le facteur et prenait ainsi la pleine mesure du travail à effectuer, détectait les difficultés ou relevait des possibilités d’économie et de productivité. Il avait une réelle vision du terrain. C’est vers le milieu des années 2000 que La Poste a transformé sa manière de calcul de charges en mettant en place une révision régulière des tournées de distribution purement comptable. La méthode de calcul ne reste alors qu’une pré-quantification du travail et ne prend évidemment pas en compte les spécificités de la tournée pesée, ni le profil du facteur et encore moins le rôle social du métier qui a besoin d’un peu de temps pour ses clients. Aucune prise en compte non plus de la pénibilité du métier. Car si la sacoche se fait plus légère, les distances restent et la météo n’est pas tous les jours clémente.pause
Cette méthode de rationalisation des coûts et de recherche constante de productivité à tout prix a eu pour conséquence soit la suppression, soit l’allongement d’un certain nombre de tournées. Ainsi, ce sont 15 000 tournées sur 70 000 qui ont disparu et pas moins de 25 000 emplois sur 100 000 sur une période d’environ dix ans. Sur le plan humain, le burn-out, les congés de maladie, les troubles musculo-squelettiques (TMS) sont devenus monnaie courante.
Cela fait maintenant de nombreuses années que FO Com dénonce ces méthodes déconnectées de la réalité et demande une remise à plat des « normes et cadences » mettant en avant le fait que seul un pesage juste des charges, mais aussi la prise en compte de l’environnement et les spécificités des facteurs, sont à même de pouvoir concilier réalité économique avec son indispensable adaptation et maintien de bonnes conditions de travail. La seule façon de s’en sortir, c’est la considération du travail réel.
Or, lorsque La Poste parle de « normes et cadences », elle y oppose son système de calcul avec un principe d’homogénéisation sur le territoire, oubliant que les normes ne peuvent pas être les mêmes partout. Mêmes normes en ruralité qu’en zone urbaine ? Dans les zones montagneuses ou touristiques ? Quid de la distribution de lettre recommandée ou de colis dans un pavillon ou dans un appartement au 17ème étage ? Ainsi, les conditions spécifiques de distribution sont ignorées.
La Poste, si elle est tenue d’évoluer et de s’adapter, devrait s’attacher dans son processus à diminuer la pénibilité (notamment au regard d’une population de postiers vieillissante), à être soucieuse des conditions de travail de tous ses agents et à garder à l’esprit que le travail doit avoir un sens. Elle y gagnerait aussi en productivité et en coûts, dans le respect de tous.

Innover oui ! Progrès social, aussi !

Elle a d’autant intérêt à être soucieuse de ses agents qu’avec le déclin des activités postales historiques, la mise en place de nouveaux services demande des efforts de la part des postiers et de réelles motivations pour accepter ce qu’il faut bien appeler une conversion professionnelle. Sensés pallier avant tout la baisse des volumes du courrier, les nouveaux services sont regroupés en trois domaines : La « Silver économie » et la santé, la transition écologique et la transition dans les territoires. En voici quelques exemples : ARDOIZ (tablette installée à domicile pour les seniors), « Veiller sur mes parents » qui assure une veille régulière auprès des personnes âgées, RECYGO (relevage de papiers à recycler), PROXI VIGIE (visite et alerte) ou encore ETG (examen du code de la route).
Ces nouveaux services de proximité ont représenté environ 2 000 emplois (en 2018) avec un chiffre d’affaires de 252 millions d’euros contre 22 millions en 2015. Cette augmentation s’est principalement faite par des acquisitions d’entreprises. A horizon 2023, les nouveaux services devraient représenter 3 à 4 % du chiffre d’affaires du Groupe. Cependant, les créations d’emplois ne sont pas toujours au rendez-vous sauf dans le domaine du colis où, avec l’explosion du e-commerce, La Poste en a prévu potentiellement 3 à 4 fois plus d’ici 2023.
FO Com a toujours soutenu La Poste dans sa recherche de nouvelles activités, seules à même de sauvegarder l’emploi. Les postiers ont également bien conscience de l’enjeu. Mais eux comme nous, ne voulons pas accepter tout et à n’importe quel prix. Donner envie de s’investir, donner les moyens, les outils, les procédures, les formations ainsi qu’un temps alloué suffisant sont gages de développement pour l’entreprise et de pérennité de l’emploi pour les personnels. Dans ce domaine, FO Com revendique la prise en compte du temps réel dans les organisations comme pour les activités historiques, des salaires à la hausse et un commissionnement en rapport avec l’investissement demandé et ce, sans objectif notifié. Enfin, ces services doivent s’inscrire pleinement dans le rôle social de La Poste, gardant ainsi la notion de Service public mais aussi la crédibilité du facteur qui, rappelons le, est le 2ème personnage public préféré des français.

Managers : acteurs décisifs dans la vie des organisations

Les méthodes de management posent parfois problème dans la mesure où beaucoup de cadres ne sont pas issus du « sérail ». Ils ne connaissent ni La Poste, ni ses métiers bien particuliers, chargés d’habitudes et de codes. S’ajoutent la pression, les objectifs et autres « CAP » qui font que, même avec la meilleure volonté, il n’est pas possible de concilier exigences budgétaires et bien-être des facteurs. Bien souvent, les cadres n’encadrent plus, ils comptent.
Quant aux encadrants de proximité, leur position devient de plus en plus intenable ; comment expliquer le changement et l’adaptation, comment les faire accepter quand tout est vitesse et précipitation ? Comment assurer une proximité humaine avec ses agents quand les horaires sont à rallonge, les heures supplémentaires non payées, les formations adéquates inexistantes ? Sans compter les réunions, brief, débrief et rebrief qui sont chronophages et n’apportent pas forcément l’information adaptée aux missions demandées.
Pour FO Com, une redéfinition du statut et du rôle des cadres supérieurs et encadrants de proximité est essentielle. Le respect des horaires, la compensation des heures supplémentaires mais aussi le retour à de la considération qu’ils sont en droit d’attendre de leurs dirigeants sont au cœur des revendications portées par les représentants FO.

FO Com : des revendications à la hauteur des enjeux

Avec ces constats, entre situation économique tendue, révolution technologique et contraintes sociales, les solutions sont parfois difficiles à trouver. D’autant qu’il faut souligner des pressions extérieures dont La Poste se passerait bien. Les rapports réguliers de la Cour des Comptes considèrent que c’est davantage le « facteur humain » qui gène les évolutions que les défauts d’organisation. Dénonçant l’emploi stable et le conservatisme des facteurs comme principaux freins à la transformation de La Poste, la Cour milite, depuis longtemps, pour une accélération des réorganisations et fait vite endosser la responsabilité aux syndicats lors des échecs dans les négociations. Car pour ces sages, « un dialogue social actif et fructueux » demande des syndicats au garde-à-vous. Pour Force Ouvrière, des solutions existent dont certaines sont faciles à mettre en œuvre. La première des priorités est de retrouver un dialogue social loyal, honnête que chacun doit pratiquer dans le but d’avancer dans les meilleures conditions possibles. Force de propositions, FO Com revendique entre autres, des formations adaptées et de qualité dans le cadre des évolutions et réorganisations qui nécessitent d’être pensées bien en amont en prenant le temps suffisant qu’exige une adaptation particulière. Les recrutements doivent être soutenus avec, en parallèle des mesures d’âges pour les plus anciens. Le un dialogue social de qualité passant surtout par le respect des accords signés, gage de négociations fructueuses. Ceux-ci respecté, les postiers retrouveront la confiance envers leurs dirigeants, confiance qu’ils ont perdu, au fil des années au regard de décisions hasardeuses et de paroles non tenues.
Oui, avec des revendications à la hauteur des enjeux, les possibilités de construire La Poste de demain existent. Cependant, l’État doit prendre ses responsabilités en assurant le financement des missions de Service public dont elle a la charge, en l’occurrence le service universel du courrier. C’est une condition indispensable qui permettra de garder une grande entreprise publique au service des citoyens, garante de cohésion sociale et pilier incontournable de la République.
Pour FO Com, la transformation, l’évolution et l’adaptation de La Poste, si elles apparaissent comme des évidences pour assurer la pérennité économique de l’entreprise, nécessitent d’être faites avec la considération de tous les postiers. Leurs emplois et leurs conditions de travail ne doivent pas servir d’unique variable d’ajustement. Bien au contraire, il est impératif de replacer l’humain au cœur des organisations, construire et écrire l’avenir de La Poste ensemble et ainsi garder et consolider une poste solide, « d’un seul bloc », dans le cadre d’un Service public ambitieux. « Simplifier la vie » des usagers et des clients est essentiel, mais relever les défis de demain avec la confiance de tous les acteurs de l’entreprise est primordial.


Les « oubliés » du Courrier

Parmi les postiers des services de la distribution, environ 10 000 occupent aujourd’hui ce qu’on appelle des positions arrières : releveurs, collecteurs, agents cabine, agents cellule S3C.oublies
Certaines de ces positions de travail permettent depuis toujours de « reclasser » des agents qui, pour raison d’inaptitudes ou de problèmes de santé, ne peuvent plus effectuer de tournées de distribution. Bien qu’indispensable au bon fonctionnement et garant d’une bonne qualité de service, ces postes de travail ne sont pas évalués à leur juste valeur et les agents ne peuvent prétendre à la reconnaissance qu’ils méritent. Pire, ils sont les « oubliés » des négociations et ainsi ne peuvent pas prétendre aux mêmes droits que leurs collègues de la distribution. Depuis toujours, FO Com est à leur côté et se bat pour qu’ils ne restent pas ces oubliés et pour qu’ils puissent bénéficier des avancées sociales. FO Com revendique notamment une vrai reconnaissance à travers le versement d’une prime à l’identique de la prime Facteur d’Avenir et un vrai parcours de carrière.
Oubliés par La Poste, reconnus et défendus par Force Ouvrière.


Jean-Philippe LACOUT

Secrétaire national FO Com au Courrier, facteur dans le département de La Loire (42) et ancien secrétaire départemental adjoint dans ce département.
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Quid des conditions de travail
des facteurs ?

En 2017, FO a signé l’accord sur leur évolution au sein de la Branche Services Courrier Colis. C’était un véritable accord-cadre ! Hélas, la non-application de l’article 2 (bien associer les facteurs à la construction des organisations et à leur vie, dimensionner les organisations proportionnellement à l’évolution des volumes, enfin cadrer la sécabilité et accompagner la conduite du changement) dans certaines régions pose de réels problèmes et crée un malaise certain.
Pour Force Ouvrière, il est nécessaire voire impératif de bien réunir les factrices et les facteurs autour de la construction des organisations. Dans le cas contraire, les agents ne peuvent pas s’approprier ni l’organisation ni leur propre travail. Dans l’accord, la première restitution par un entretien est capitale : en effet, cette démarche d’écoute permet de cerner les éléments rendant compte du travail réel et ces derniers doivent être intégrer à l’organisation du travail.
Cet article 2 est fondamental pour d’autres raisons : il permet notamment d’éviter l’apparition de « tournées aberrantes ». De plus, il oblige La Poste à évaluer la charge de travail de chaque tournée pour éviter une productivité à outrance et ainsi améliorer l’organisation du travail. Ainsi, le chronométrage de la tournée permet de mesurer la charge de travail réelle. Pour moi, c’est fondamental afin d’éviter la dégradation des conditions de travail des facteurs et même pour favoriser leur amélioration.

Quelles sont les conséquences de cette détérioration des conditions de travail chez les facteurs ?

Cette détérioration entraîne l’émergence de risques psychosociaux, d’une perte de sens et d’identité. Par exemple, un facteur qui travaille depuis 20 ans à La Poste en zone rurale ne se reconnaît plus dans ce qu’il fait. Avant, le service dénommé « Veillez sur mes parents » était un service effectué gratuitement par le facteur et le lien social en était renforcé.
Désormais, facturer ce service et le faire payer à l’usager devient incompréhensible : le lien social se délite au profit du « business » et de la rentabilité. Cette évolution crée une perte de sens qui est visible chez les fonctionnaires notamment et qui modifie la culture de La Poste.
Pire, rendre service au client peut entraîner des sanctions. J’ai en tête l’exemple d’une grand-mère qui voulait faire envoyer une lettre par l’intermédiaire de son facteur. Celui-ci a rendu le service mais cela lui a valu une demande d’explication, une sanction disciplinaire en somme.
Ce contexte peut créer des tensions voire de la colère chez les agents pour qui l’aide aux usagers était, en son temps, devenu une habitude. Pour le facteur en question, ce fut un véritable crève-cœur !
Et, le rapport des assistants sociaux attestent de ce phénomène concernant le changement de culture d’entreprise. Le rapport à l’entreprise n’est plus le même, plus distancié.

Courrier – chantier normes et cadences
Point d’étape

Concernant le chantier normes et cadences, les discussions entre les syndicats signataires de l’accord courrier et la Direction continuent ; des points d’étape sont prévus au cours de l’année 2018. Pour Force Ouvrière, il doit y avoir à la distribution un vrai calcul de la charge de travail et la prise en compte du travail réel plutôt que du travail prescrit.
En effet, toutes les particularités liées à la topologie du terrain, aux divers moyens de locomotion, aux localisations des tournées etc. sont régulièrement occultées. Exemples…

à vélo avec assistance électrique (VAE)

Pour les factrices et les facteurs qui font leur tournée à vélo avec assistance électrique, la vitesse devrait être adaptée en fonction des différentes topologies des terrains parcourus. Ainsi, les tournées avec de fortes pentes doivent être considérées avec attention par la Direction. FO a interpellé la Direction concernant les batteries ! Car, à trop vouloir rallonger les tournées des factrices et les facteurs, se pose le problème de leur autonomie.

En voiture électrique

rechargement-batteriePour les facteurs qui effectuent leur tournée en voiture électrique, on constate également le même phénomène. Certains facteurs qui font leur travail avec ce type de véhicule se voient ainsi contraints de terminer leur tournée sans chauffage. Ce qui pose de graves problèmes lors des périodes de froid ou de grand froid.

à pied

Concernant les facteurs piétons, le problème de la topologie des tournées existe aussi. Les tournées avec de fortes pentes par exemple…
Les structures sociales des quartiers ont aussi un impact sur la tournée des facteurs piétons. En Zone Urbaine Sensible (ZUS) par exemple, il y a beaucoup plus de recommandés à cause des différents problèmes sociaux rencontrés dans ces quartiers. Cela alourdit la charge de travail mais ce n’est pas pris en compte par la Direction ! Dans les grandes villes, durant les périodes de vacances scolaires, la fréquence des transports en commun est souvent divisée par deux ou pire, cela a un fort impact pour les facteurs piétons qui les utilisent et cela dégrade leurs conditions de travail.

avec plusieurs moyens de locomotion (MOLOC)

Lorsqu’un facteur utilise plusieurs moyens de locomotion au cours de sa tournée, la vitesse de déplacement de chaque MOLOC doit être prise en compte. Il est impératif de le vérifier sur le bordereau de collectes et sur le bulletin d’itinéraire car dans certains territoires ce n’est pas toujours le cas.
Lors des travaux intérieurs, FO considère qu’il est impératif de conserver la dimension humaine ! Or les cadences de tri en PDC, PPDC ou PIC sont beaucoup trop élevées. Lorsque La Poste pré-quantifie la charge de travail et va au-delà de l’inacceptable, ce n’est pas concevable ! Par exemple, la cadence dans un centre de distribution est de 1 500 plis triés à l’heure ; pour FO, 1 000 plis par heure, c’est le grand maximum !

FO revendique une amélioration de la quantification de la charge de travail pour les factrices et les facteurs avec une prise en compte « sincère et incontournable » du travail réel.
FO est absolument vent debout contre la pré-quantification des tournées des facteurs !

Factrices, facteurs, l’évolution de leur métier

De nombreuses raisons poussent La Poste à faire évoluer les missions qui ont jusqu’ici été les siennes, et même à réfléchir sur la mise en place de nouvelles activités afin de compenser l’inéluctable diminution du volume du courrier traditionnel dont elle a la charge. Tout l’enjeu est de bien penser et encadrer ces futures évolutions, de s’engager pleinement sur ces nouveaux secteurs d’activité et de se donner réellement les moyens d’y parvenir. Un enjeu à la taille de l’entreprise qui, en toute logique, va principalement être porté par les acteurs de ces nouveaux métiers : les factrices et les facteurs.

factrice-kaddie

Un contexte fortement anxiogène !

  • Le volume des courriers échangés par voie postale continue de décroître

Pour le courrier traditionnel, concurrencé par les médias électroniques, 2016 a encore été une mauvaise année. Le chiffre d’affaires du courrier a baissé de 2 % et représente désormais moins de 40 % de l’activité postale. La poursuite de la baisse des volumes
(- 5,2 %) n’a été que partiellement compensée par la hausse du prix du timbre, par la croissance de l’international et par le développement des services de proximité.

  • Activités rentables et concurrence exacerbée

Le commerce en ligne, qui monte en puissance, entraîne dans son sillage le marché du colis qui attise bien des convoitises. La Poste reste le leader du secteur en France, mais est cependant défiée par d’autres entreprises. Dans l’Union européenne, où La Poste a
de solides positions, la concurrence des trois géants du secteur (UPS, FedEX et DHL) risque de se faire de plus en plus forte. Et la quatrième directive postale européenne en préparation pourrait encore affaiblir le secteur. (cf. la rubrique sans frontières.)

  • Quid de la responsabilité de l’État actionnaire ?

Pour donner un second souffle à La Poste, l’État actionnaire doit être plus volontariste. Il doit accompagner La Poste sur des projets innovants pour que l’entreprise engage une nouvelle vie dans le monde numérique.
Si La Poste est encore à ce jour considérée comme un pilier du service public en France, l’État actionnaire doit lui donner les moyens nécessaires et assurer l’égalité de traitement des citoyens sur tout le territoire.
Ceci est d’autant plus vrai que se négocie actuellement le contrat d’entreprise 2018-2022 entre l’État et La Poste.

  • La Poste n’est pas assez offensive !

Pour FO, il faut se donner les moyens pour que La Poste devienne une entreprise d’intermédiation sociale et spécialisée dans le service à la personne. Il existe des pistes comme le service «Veillez sur mes parents», mais, pour l’instant, ces activités sont soit trop marginales, soit trop éloignées de celles du métier des facteurs.

Certains parlent de proximité humaine…

  • Ils l’ont dit !

« La Poste va devenir en 2020 la première entreprise de proximité humaine de [France]. » (P. Wahl, PDG du groupe La Poste)
« La Poste est un réseau social, mais avec de vrais gens ! » (N. Collin, DG Adjointe en charge de la communication)
« Notre ambition est d’être le premier opérateur de service de proximité humaine autour du domicile. » (P. Dorge, DG Adjoint en charge de la Branche Services-Courrier-Colis)

  • Quèsaco ?

Tous ces éléments de langage semblent un peu flous. « Proximité humaine », cela aurait pu être le titre d’un roman de l’auteur sulfureux Michel Houellebecq. Il n’en n’est rien ! Si ce n’est pas assez clair, la proximité humaine indique, en deux mots, la stratégie de La Poste, aussi bien dans les médias que dans les éléments de langage des responsables de l’entreprise et que dans son plan stratégique dénommé ambitieusement « La Poste 2020 : conquérir l’avenir ».

  • Il fut un temps…

…où le facteur bavardait avec les usagers, où les guichetiers remplissaient les remises de chèques des usagers… La « proximité humaine » était déjà dans l’ADN de tous les postiers. Cette proximité humaine nouvelle serait plutôt le marqueur d’une contractualisation de pratiques naguère informelles entre le facteur et l’usager. Le « lien de confiance » entre les postiers et leurs clients semble être la « valeur ajoutée » du groupe La Poste.

  • Un nouveau service fortement médiatisé

Dernier exemple en date: « Veillez sur mes parents ». Contre une redevance mensuelle, le facteur passe voir si les parents âgés et éloignés de leurs enfants vont bien lors d’une ou plusieurs visites hebdomadaires… Temps moyen estimé de la visite: sept minutes ! Car, à La Poste, tout est minuté, monétisé, robotisé…

  • Des activités qui interrogent l’identité des facteurs

FO reste méfiante quand on sort du métier de facteur, par exemple lorsqu’il s’agit de portage de repas (comme «Savourez chez vous »). Avec ce service, des conditions d’hygiène spécifiques et surtout le respect de la chaîne du froid doivent être intégrés.
De même, FO s’oppose à certaines expérimentations (telles la récupération de plastiques ou le portage de pain voire de fleurs) et estime que ces expériences doivent faire évoluer naturellement le métier du facteur, comme le font par exemple le portage de médicaments en partenariat avec des pharmacies ou la vigie urbaine (c’est-à-dire le signalement de la dégradation des trottoirs d’une ville ou celui de distributeurs automatiques de billets).
Le métier du facteur ne doit pas être dénaturé, que ce soit en termes de conditions de travail ou d’identité et d’image, au risque d’y perdre sa crédibilité et ce qui fait de lui le 2e personnage public préféré des Français.

Des conditions essentielles pour que La Poste réussisse sa transformation !

  • Vers un contrat de confiance ?

Pour FO, ce contrat doit aussi exister entre La Poste et les facteurs. En France, il y a environ 80000 facteurs et « il n’est de richesses que d’hommes ». Notamment, dans une entreprise de main-d’oeuvre telle que La Poste. Celle-ci doit rétribuer comme il se doit les nouvelles missions proposées aux factrices et aux facteurs.

  • « Simplifier la vie »… des facteurs et des factrices aussi !

Conditions de travail, outils, procédures, relation avec l’encadrement… Tous ces éléments doivent être simplifiés pour motiver les facteurs et leur donner l’envie de s’investir humainement dans ces nouvelles activités.

  • Le temps retrouvé

Le succès de ces nouvelles missions confiées aux facteurs dépendra du temps alloué par La Poste pour les mener à bien. Responsabilisation rime avec liberté d’organisation et non pas optimisation…

  • Pour FO, l’emploi reste la priorité !

Des formations adaptées et de qualité auront pour objectif de maintenir dans l’emploi toutes les factrices et tous les facteurs. Les recrutements doivent s’amplifier. Dans le même temps, des mesures d’âge doivent permettre aux facteurs seniors de transmettre leur savoir dans les meilleures conditions.

Une expérimentation des nouvelles activités des facteurs

Dans les Hauts-de-Seine, la Direction expérimente la création d’une équipe de Facteurs Services Expert (FSE) sur une durée de six mois. Un Responsable Opérationnel (ROP) encadre six FSE. Ces facteurs auront le grade II-2, voire II-3. Leur travail est segmenté en trois zones géographiques (le nord, le centre et le sud du département).
Ces services sont classifiés selon quatre niveaux d’expertise :

  • niveau 1: la remise commentée (le facteur lit un argumentaire lors de la remise d’un pli publicitaire),
  • niveau 2: la dénomination et la numérotation des voies (notamment lorsque des habitations sont construites) et la visite dans le cadre du projet «Veillez sur mes parents »,
  • niveau 3: le premier rendez-vous pour Veillez sur mes parents et l’installation d’ARDOIZ, une tablette destinée aux seniors,
  • niveau 4: la conception de diagnostics (nécessaires lors de la vente d’un bien immobilier).

Comme FO l’avait demandé, cette équipe ne fait pas de distribution de courrier sur les établissements où ils seront pré-affectés à cause du climat social ou d’un taux d’absentéisme élevé. Il existe aussi une garantie de retour pour les collègues au cas où l’expérimentation ne donne pas satisfaction !

Facteurs-guichetiers : le retour

Les premiers facteurs-guichetiers ont été mis en place en août 2013. Ce n’est qu’en avril 2015 que sera validé et signé un protocole de déploiement de ce dispositif. Courant 2016, FO dénonçait des conditions inqualifiables et réclamait l’ouverture de négociations.
Si aujourd’hui il y a de l’amélioration quant à la mise en place de cette fonction, le protocole n’est pas respecté dans sa globalité sur l’ensemble du territoire. Fin septembre 2017, 697 facteursguichetiers étaient en fonction pour un objectif de 1 000 à fin 2017. 496 d’entre eux ont été promu II-1, ce qui correspond, pour un chargé de clientèle, au niveau d’entrée permettant aux agents issus du Courrier/Colis d’y accéder. Notre première revendication est que les facteurs guichetiers bénéficient d’un parcours valorisant.
L’accord National sur « l’amélioration des conditions de travail et sur l’évolution des métiers de la distribution et des services des Facteurs…» signé en février 2017 prévoit l’ouverture de chantiers dont celui de la mutualisation des fonctions avec le Réseau. Il est précisé que « La Direction de La Poste s’engage sur une concertation commune Réseau Courrier, pilotée par les deux métiers ». Nous avons demandé des documents communs aux deux métiers ainsi que des instances communes pour créer une réelle
synergie entre les deux métiers. Nous attendons de ce chantier un rappel des principes de mise en place et des actions concrètes. Si nous avons obtenu le versement de la prime commerciale des chargés de clientèle à hauteur de 0,49% pour les facteurs-guichetiers à partir de décembre 2017 ainsi que le versement du commissionnement pour leur contribution aux résultats des objectifs du Secteur, nos actions se poursuivent pour obtenir la tenue de l’ensemble de la formation avant la prise de fonction et une intégration à celle concernant les incivilités.
La Poste ne se donne pas les moyens réels pour la réussite de ce métier et nous ne parlons pas que des facteurs-guichetiers titulaires mais aussi des remplaçants, les grands oubliés…

La silver economy au coeur de la stratégie de la poste

Veillez sur mes parents !

Au premier abord, ce service qui est au coeur de la silver economy peut être intéressant. Mais avant le chronométrage des tournées, les facteurs veillaient sur les seniors gratuitement. Pour FO, c’est le financement qui pose problème. C’est à l’État d’assurer l’égalité de traitement entre tous les citoyens, notamment les seniors, pour faire face au vieillissement de la population. Comment cette expérimentation se déroule-t-elle sur le terrain? C’est la question que tous les concernés peuvent se poser…

Nous avons interrogé un Facteur Services Expert (FSE) qui gère, pour l’instant, un seul contrat. C’est lui qui fait la visite chez la personne âgée, deux fois par semaine: le lundi et le jeudi. Il reste en moyenne 10 à 15 minutes en fonction des disponibilités. Cette mission demande voire exige de l’implication et le temps octroyé à la personne âgée dépasse largement la moyenne utilisée par la Direction, qui l’évalue à 7 minutes. Cette nouvelle mission si elle est trop minutée pourrait donner une mauvaise image de La Poste. Dans le cadre de ce projet, la formation est un levier à reconsidérer. Effectivement, pour l’instant, les FSE ne se forment que par e-learning. 20 minutes ne peuvent pas suffire pour former aux problématiques du grand âge. Autre contrainte, en cas de gestion de plusieurs contrats, ce n’est plus vivable! De plus, Factéo n’est pas opérationnel pour les personnes âgées. Certains seniors n’arrivent pas à signer sur ce smartphone.
Pour FO :

  • La formation devrait être approfondie en présence de professionnels comme des psychologues, des gérontologues, et d’autres spécialistes.
  • Il faut impérativement plafonner le nombre de contrats «Veillez sur mes parents » par FSE, en termes de temps et de charge de travail.
  • Les outils doivent être adaptés aux seniors.
  • C’est le temps de travail réel qui doit être pris en compte par La Poste. D’où l’importance du chantier «Normes et cadences » (cf. interview).