Dans un contexte d’inflation galopante et de difficultés de recrutement, la question salariale et plus globalement celle du pouvoir d’achat est aujourd’hui LE sujet d’actualité. Déjà lors de la rentrée 2021, c’était au cœur des revendications donc bien avant le conflit en Ukraine et la spectaculaire hausse des prix. La crise du COVID 19 avait également mis en lumière les problèmes de pouvoir d’achat avec ces métiers des premières et secondes lignes si indispensables mais ô combien mal rémunérés. Aujourd’hui, le niveau de l’inflation, renforce notre exigence. Pour FO, dont la revendication salariale n’est pas nouvelle, il y a urgence : l’augmentation des salaires, retraites et minimas sociaux c’est maintenant !
Après avoir essayé de nous convaincre du danger que représenteraient des augmentations générales de salaire avec des arguments tels que « le coût du travail » ou « le frein à la compétitivité », le gouvernement est aujourd’hui bien obligé d’agir face à une inflation jamais atteinte depuis 1985 ( + 6,1 % en juillet 2022 / juillet 2021). Pour autant, les mesures prises sont en deçà des attentes et des besoins ; elles sont mêmes, pour beaucoup, inadaptées voire dangereuses.
À Force Ouvrière, nous considérons et, ce n’est pas nouveau, que les fruits de la croissance doivent être mieux répartis, que les difficultés à recruter doivent s’accompagner d’une baisse de la précarité, d’un effort particulier sur les salariés les moins bien rémunérés. Les compétences doivent êtres mieux valorisées. Pour autant, Force Ouvrière entend également défendre des mesures collectives.
Des augmentations insuffisantes…
Le dégel du point d’indice des fonctionnaires (+ 3,5 %), l’augmentation des retraites de base et de certaines prestations sociales (+ 4,0 %) sont largement insuffisants. Si on compare l’augmentation du point d’indice, 3,5 %, à la perte de pouvoir d’achat depuis 2000, 25 % dont 8 % depuis 2017, on est loin du compte ! Rappelons que l’INSEE prévoit une inflation d’environ 7 % en fin d’année. Nous ne sommes pas dans l’anticipation et bien loin du rattrapage. Le problème reste donc entier. Même scénario pour les retraités. En augmentant les pensions de 4 %, le gouvernement fait fi de l’amendement qui portait la revalorisation à 5 % expliquant, pour se justifier, prendre en compte les 1,1 % de janvier 2022….omettant de préciser que ces 1,1 % étaient censés compenser l’inflation de 2021. Et quand bien même, la perte est réelle ; elle serait, selon certains économistes de 2,4 %. Enfin, quelle injustice de ne pas augmenter les retraites complémentaires qui représentent une part non négligeable des pensions. Pour FO, cette revendication demeure. Concernant le SMIC, son augmentation ne rattrape jamais l’inflation ! Avec 1 302 euros mensuels, le salaire minimum reste très proche du seuil de pauvreté établit à 1 102 euros. À noter qu’en France, le taux de pauvreté demeure élevé à 14,6 %, ce qui veut dire que 14,6 % de la population vit sous le seuil de 60 % du salaire médian soit avec moins de 1 102 euros par mois. Force Ouvrière revendique un véritable coup de pouce en plus des augmentations légales soit un salaire minimum de 1 500 euros (60 % du salaire médian) assortie de la remise en place de l’échelle mobile des salaires, système qui permet une augmentation automatique de tous les salaires et évite ainsi le tassement des grilles. Mais les décisions concernant le salaire minimum sont corrélées à l’avis d’un groupe « d’experts » (dont Force Ouvrière demande la suppression) qui considèrent le SMIC inopportun car contribuant à augmenter le coût du travail. Ils préfèrent mettre d’autres leviers en avant tels que les négociations salariales de branche ou des prestations type prime d’activité ou aide au logement. Des considérations relayées par le directeur général du Travail auprès du gouvernement qui lui aussi considère qu’augmenter la SMIC c’est nuire à la compétitivité des entreprises, notamment à l’international, oubliant que bon nombre d’emplois au SMIC ne sont pas dé-localisables (aide à la personne, caissier(e)s, employés de nettoyage..). Avec une désarmante contradiction, le gouvernement ne donne aucun signe fort aux entreprises alors qu’elles ont bénéficié des réformes sur la déréglementation du travail, d’allègement de la fiscalité du capital, d’aides publiques importantes et d’exonérations de cotisations sociales. C’est pourquoi, ces mêmes entreprises devraient être dans l’obligation de répondre à leurs obligations sociales. Car la question salariale est indissociable des aides publiques. Elles sont estimées, d’après Gérald Darmanin, entre 142 et 143 milliards d’euros sans qu’il soit demandé de contreparties ! Il serait logique de « rendre des comptes », comme l’amélioration salariale mais aussi des conditions de travail ou encore le maintien des emplois. Pour FO, c’est clair : pas de contractualisation salariale, pas d’aides publiques !
…et une politique de rustines…
En plus de ces augmentations des pensions de retraite, minima sociaux et du dégel du point d’indice, la loi d’urgence sur le pouvoir d’achat prévoit des mesures telles que la création du chèque alimentaire, le bouclier tarifaire, la reconduction et revalorisation de la prime d’activité, le triplement de la prime PEPA ou encore l’élargissement du dispositif d’intéressement. Bien évidemment ces mesures ne répondent pas au problème même si cela contribue, momentanément, à « mettre du beurre dans les épinards ». Les primes ont un caractère aléatoire, leurs montants peuvent être variables et tous les salariés ne peuvent y prétendre. On est loin de l’augmentation salariale ! La prime PEPA ou « prime Macron » en est un bon exemple : elle n’a été versée qu’à un salarié sur 5 en 2021 pour un montant moyen de 506 euros alors qu’il avait été annoncé un versement de 3 à 6 000 euros ! L’intéressement est également une mesure hypothétique puisque soumis à accord d’entreprise avec respect de critères de compétitivité. Quant au chèque alimentaire, il s’apparente plus à une aumône qu’à une rémunération salariale. Dans nos économies, tout s’achète et notamment la paix sociale, les aides ponctuelles et ciblées permettent au gouvernement de dispenser les entreprises, le patronat, de leur responsabilité sociale.
…vers une véritable et dangereuse injustice sociale.
Qui paye ? Certainement pas les entreprises qui ne cessent de réclamer des exonérations de cotisations sociales et aides en tout genre sans pour autant répondre à la question salariale ni contreparties. Donc ce ne sont pas les revenus du travail qui sont mieux redistribués, mieux répartis mais l’État qui met la main à la poche donc fait payer….le contribuable.
Ainsi, les entreprises engrangent les profits, gavent les actionnaires, empochent les aides gouvernementales quand salariés, fonctionnaires et retraités ont de plus en plus de mal à boucler les fins de mois… Empêtré dans une politique d’austérité qui voit l’augmentation des salaire comme un frein à l’économie, le gouvernement, dans son programme de stabilité présenté devant les États membres de l’Union Européenne, mise sur le « travailler plus » pour aboutir au plein emploi et masque son manque de courage et sa peur du salaire par une poursuite de la basse des impôts et des dépenses publiques. Et nous voici face à un cocktail explosif… Moins de salaire donc moins pour la protection sociale, plus d’austérité donc moins de services publics… La baisse du pouvoir d’achat ralentit la consommation qui, couplée à la hausse des prix nous font craindre une éventuelle récession. Et le danger économique a, bien évidemment, de graves conséquences sociales au regard des inégalités qui se creusent et de la pauvreté qui gagne du terrain.
Alors que les chiffres et statistiques, qu’ils soient ceux de l’INSEE ou de l’OCDE, illustrent la pertinence de nos analyses et confortent nos revendications, il est plus que jamais indispensable de continuer l’action revendicative de notre organisation. Sinon, la situation, déjà intenable, pourrait exploser, le chaos se mêlant alors à l’injustice.