Le 15 février, 80% en moyenne des fonctionnaires portugais étaient en grève pour une augmentation de leur salaire, à l’appel des deux principales organisations syndicales du pays, la CGTP et l’UGTP. Cette grève s’est inscrite dans un contexte social général déjà très agité, marqué notamment par une grève entamée le 31 janvier à l’appel de deux syndicats d’infirmiers, revendiquant eux aussi des augmentations, mais aussi par une multiplication des grèves dans le secteur privé. Pourtant, le gouvernement socialiste élu en 2015 a progressivement relevé le salaire minimum du secteur privé de 530€à son arrivée au pouvoir à 600€ brut (sur 14 mois) à compter du 1er janvier 2019. Mais le loyer mensuel moyen pour un logement d’une pièce à Lisbonne ou à Porto avoisine les 850€.
Le 1er janvier également, le salaire minimum de la fonction publique a été augmenté en une seule fois, de 580€ à 635€. Mais cette hausse concerne à peine 10 % des 665000 fonctionnaires du pays. Le gouvernement d’Antonio Costa a également rétabli les 35 heures dans la fonction publique (au lieu des 40 heures imposées par la Troïka en 2011) et embauché 20000 fonctionnaires dans l’éducation, la santé et la justice. Mais 110000 postes avaient été supprimés par le précédent gouvernement…
De plus, le gouvernement actuel, non content de n’être pas revenu sur la loi Travail de son prédécesseur (qui a facilité les licenciements), a pour projet de déréglementer plus encore le droit du travail avec une nouvelle réforme qui autoriserait les entreprises à payer un quota d’heures supplémentaires au tarif des heures normales.
Et si le taux de chômage officiel est descendu à 6,7% en 2018, contre 18% de 2011 à 2014, en réalité environ 30% des salariés sont sous contrats précaires. Le taux grimpe à plus de 41% parmi les moins de 35 ans et à 66% pour les moins de 25 ans.
« Gangsters du numérique » : Facebook en accusation
Une commission parlementaire britannique a publié un rapport accablant pour le réseau social traité de « gangster du numérique ».
Tout part du scandale Cambridge Analytica au Royaume Uni, cette entreprise liée à l’extrême droite américaine et à Steve Bannon, un temps collaborateur de Donald Trump, qui a utilisé des dizaines de millions de données personnelles de Facebook pour envoyer des publicités politiques ciblées. L’enquête porte également sur des soupçons de désinformation russe profitant du laxisme de Facebook dans la protection des données personnelles.
Et le rapport estime que Facebook a agi « en toute connaissance de cause et intentionnellement ». Ce qui constitue un problème majeur concernant le plus grand réseau social mondial, utilisé par plus de deux milliards d’individus, pour nombre desquels il constitue l’accès principal à l’information.
Les faits montrent que l’autorégulation est illusoire. Le rapport préconise, pour le Royaume-Uni, la création d’une autorité indépendante de régulation des réseaux sociaux, habilitée à faire retirer des contenus litigieux, imposer la transparence, sous peine de fortes amendes… Toutes mesures qu’il y aurait lieu de généraliser au niveau européen afin d’infléchir le rapport de force en faveur des citoyens.
Des syndicats européens affaiblis mais essentiels
Chômage et individualisation obligent, les syndicats perdent de la vitesse en Europe, mais demeurent la principale force de frappe contre les inégalités salariales. En leur absence, il arrive que des salariés précaires s’organisent pour arracher des droits.
Le mouvement d’érosion a commencé dans les années 1980. Le taux de syndicalisation en France, Pays-Bas, Irlande, Grande-Bretagne ou Suisse, a chuté de plus d’un tiers, selon l’OCDE. Économistes et instituts de recherche lient cette baisse à une montée de l’individualisation, au chômage, à la précarisation de l’emploi, puisque précaires, sans-emploi et retraités se syndiquent peu. L’Institut de recherche économique et social (Ires) évoque aussi une baisse des ressources financières.
En Europe, le taux de syndicalisation est très variable et difficilement comparable tant les systèmes diffèrent. De près de 10 % en France ou en Pologne, il frôle les 20 % en Allemagne et en Espagne et culmine à près de 70 % en Suède et Finlande. Or l’ampleur de la syndicalisation a un impact sur l’égalité salariale.
En 2015, deux chercheurs du Fonds monétaire international (FMI) – peu complaisant avec les syndicats – ont publié une étude en ce sens, montrant que le déclin des syndicats dans les pays riches a aggravé les inégalités sociales. Un déclin qui a réduit « la capacité de négociation » des salariés au bénéfice des actionnaires et des plus gros revenus. La présence syndicale diminue également le recours aux stock-options, de même que les niveaux des salaires des P.-D.G.
Le taux de couverture conventionnelle importe également car les conditions salariales sont plus favorables quand on est couvert par une convention collective. Généralement supérieur à 50 %, il frôle les 100 % dans certains pays (Autriche, France, Slovénie).
La puissance de négociation varie d’un pays à l’autre. Le syndicat de branche allemand, IG Metall (2,3 millions d’adhérents) vient d’arracher un accord sur la semaine de 28 heures et une hausse des salaires. Le puissant syndicat était le seul interlocuteur face au patronat mettant en avant une union syndicale qu’on retrouve aussi en Espagne ou en Suède.
Europe : la productivité augmente mais les salaires décrochent
Les augmentations salariales auraient pu être plus de quatre fois plus élevées en moyenne dans l’Union européenne ces seize dernières années si elles avaient été alignées sur la hausse de la productivité, alerte la Confédération européenne des syndicats (CES).
Selon une loi de microéconomie considérée comme majeure, les augmentations salariales suivent les augmentations de productivité. Mais depuis plus de quinze ans, cette loi ne se vérifie plus dans la majorité des pays industrialisés, en particulier en Europe. Cette tendance, qui a pour conséquence une augmentation des inégalités, est également constatée par l’OCDE.
Selon les chiffres de l’Institut Syndical Européen, de 2000 à 2016 la productivité a augmenté trois fois plus que les salaires en Allemagne et en Croatie et deux fois plus en Pologne et en Belgique. L’augmentation de la productivité a été plus élevée que celle des salaires de 65 % en Autriche, de 60 % en Espagne et de 30 % aux Pays-Bas. Les salaires réels ont même diminué en Hongrie, en Roumanie, au Portugal et en Grèce, alors que la productivité n’a pas cessé d’augmenter dans ces pays.
En moyenne, la productivité du travail dans l’Union européenne à 28 était supérieure de 10,5 % en 2016, alors que les salaires réels n’y ont augmenté que de 2,45 % sur la même période, soit plus de quatre fois moins.
Si les salaires restent à la traîne derrière la productivité, les travailleurs ne reçoivent pas leur juste part de la richesse produite. C’est non seulement profondément injuste mais aussi néfaste économiquement. Le travail est la principale source de revenu pour les ménages et la consommation privée représente la plus grande partie de la demande globale.
Il est donc urgent de corriger ce décrochage entre les salaires et la productivité en renforçant la négociation collective et en relevant les salaires minima.
La poste tchèque manque de main-d’œuvre
Rencontrant des difficultés à recruter des salariés, la société peine à pourvoir des postes de guichetiers et de facteurs avec, pour conséquence, des problèmes pour acheminer le courrier dans certaines communes.
Il faut dire que la poste tchèque n’est pas la seule entreprise à être impactée par le manque de main-d’œuvre. Le taux de chômage est en effet descendu à 3,5 %. Seulement, pour un service tel que la poste, cette situation peut entraîner des conséquences réellement fâcheuses pour les usagers. Ainsi, dans certaines municipalités, certains habitants ne reçoivent pas à temps leurs factures et s’exposent à des complications, simplement parce que le service postal ne peut être assuré dans de bonnes conditions.
Les syndicats se plaignent également de la situation. À la mi-mars, ils ont remis une pétition au Premier ministre du gouvernement démissionnaire d’Andrej Babiš. Dans son règlement, la poste tchèque se doit d’assurer les services postaux fondamentaux du pays.
Or, ceux-ci ont un coût important, qui pèse sur le budget de l’entreprise, et l’État tchèque, selon les syndicats, apporte une contribution financière bien trop faible. Au final, ce sont les employés qui ressentent les effets de ce manque d’argent, en exerçant leur profession pour de faibles salaires et dans de mauvaises conditions de travail.