Décidemment, le débat sur le projet de loi relatif à la « croissance l’activité et l’égalité des chances économiques » ne laisse pas de surprendre, mêlant l’imagination à l’improvisation. C’est ainsi qu’au détour d’un amendement l’article 9 du texte nous révèle que, face à l’engorgement du cursus du permis de conduire « des agents publics ou contractuels » pourraient être missionnés par l’autorité administrative en tant qu’examinateurs des épreuves de conduite pour l’obtention du permis des véhicules légers.
Ayant d’abord cru à un canular, la fédération Force Ouvrière de la Communication a dû se rendre à l’évidence : les postières et les postiers seraient concernés.
En effet, M. Macron lui-même l’a affirmé devant les députés, indiquant qu’il avait « demandé au Président de La Poste de s’organiser en conséquence ».
Sur la forme, pareille injonction confirme la place subsidiaire que tient le dialogue social dans les préoccupations gouvernementales alors qu’il s’agirait d’une mesure bouleversant la nature même du métier de postier. Sur le fond, et pour autant qu’on soit en mesure de le discerner à ce jour, FO Com tient à rappeler ceci :
Les postières et les postiers sont profondément attachés aux missions de service public qui leurs sont dévolues et confèrent un sens à leur activité quotidienne. Ils s’en acquittent pourtant avec de plus en plus de difficultés en raison du désengagement financier de l’Etat et d’une orientation vers le tout commercial.
Malgré cela ils ne sont pas hostiles par principe à ce que de nouvelles activités d’intérêt général puissent leur être confiées, notamment sur les territoires en difficultés et à condition qu’elles soient fondées sur la solidarité et l’aide à la personne. A condition aussi que ces tâches ne contribuent pas à accélérer la disparition d’autres emplois publics et n’atteignent pas leur éthique professionnelle. Quid du postier chaleureux qui vous salue et rend service le matin et qui se mue l’après-midi en inspecteur qui tranche souverainement pour l’attribution d’un sésame de couleur rose…
Outre ces aspects déontologiques s’est-on interrogé sur les questions juridiques et de compétences induites par cette « innovation ». ? Aux problèmes de formation, de certification professionnelle ? De responsabilité et de disponibilité ?
Ces personnels seraient-ils mis à disposition par La Poste – donc toujours payés par elle – ou détachés auprès du ministère de l’Intérieur ?
Dans le premier cas travailleraient-ils à « charge d’emploi » ou bénéficieraient-ils d’une rémunération complémentaire ?
Officieraient-ils hors de leur temps de travail de postier ou pas ? Etc….
Ce halo d’interrogations ne peut que s’étendre et renforcer l’inquiétude des postières et des postiers quant à l’avenir de leur profession.
Seraient-ils trop nombreux ou inoccupés ?
Le ministre de l’économie, qui fut naguère étudiant en philosophie, semble avoir oublié que l’empirisme conduit souvent à l’approximation et que le dialogue devrait l’emporter sur l’injonction.
Nouveau venu dans le caravansérail de la loi Macron, le postier-inspecteur ressemble fort à un sujet de concours Lépine.
Paris, le 2 février 2015
Le Secrétaire Général
Jacques DUMANS