Le contrat de présence postale territoriale 2020-2022 signé entre l’Association des Maires de France (AMF), L’état et La Poste définit les obligations de La Poste en matière de présence postale sur le territoire français.
De par la loi du 2 juillet 1990, La Poste à l’obligation de maintenir et d’adapter un réseau d’au moins 17 000 points de contact ; tout en garantissant à 90% de la population une proximité de moins de 5 kms ou de 20 minutes en voiture.
Pour se faire, La Poste perçoit une compensation financière annuelle versée sur un fonds dédié, dit de péréquation territoriale. Mais ce fonds reste inférieur au coût réel de la mission. En 2018, l’écart était de 60M€. La contrainte financière est donc forte, d’autant plus forte que La Poste, devenue SA en 2010, se doit de répondre à des exigences de rentabilité.
Le contrat définit des priorités pour 2020-2022 autour de 4 thématiques que sont le numérique, la contribution à l’aménagement et au développement du territoire, le soutien à la mutualisation et le développement des partenariats ainsi que l’amélioration à l’accès au cash. Par ailleurs, il réaffirme le rôle du maire, priorise les DOM, les territoires ruraux et les quartiers urbains défavorisés. Il contribue à l’inclusion numérique et consolide le rôle des Commissions Départementales de Présence Territoriale (CDPPT).
Le renforcement du rôle du maire va permettre aux élus d’avoir la main dans les territoires ruraux, notamment sur les formes de la présence postale en restant « maître » de celles-ci dans les communes de plus de 10000 habitants. Mais il est bien évident que les marges de manœuvre sont étroites. La Poste continuera à appliquer la politique territoriale de l’état et de son bras armé, la Caisse de Dépôts et Consignation.
Où en sommes-nous de cette présence postale territoriale ?
Au 31 décembre 2018, La Poste comptait 17 238 points de contact permettant à 95,67% de la population d’être à moins de 5 km ou moins de 20 mn d’une forme de présence postale. Mais cela ne veut pas dire que chaque citoyen est égal devant le service postal, loin s’en faut. Sur un total de 17 238 points de contact, seuls 8 144 sont des bureaux de poste qui, eux-mêmes, n’offrent pas des services identiques.
Ainsi, le réseau se compose aujourd’hui :
- de bureaux de poste (BP), appellation générique qui recouvre les BP « classiques », les Maisons de Service Au Public (MSAP)/Maisons France Service (MFS), les bureaux facteur-guichetier et les bureaux quartiers prioritaires ;
- de partenariats : Agence Postale Communale et Intercommunale (APC/API), Relais Poste Commerçant, Relais Poste Urbain, Relais « économie Sociale et Solidaire Service + ».
Sur le plan quantitatif, cela donne la répartition suivante au 31 décembre 2018 et hors DOM :
- 17 238 points de contact au total ;
- 9094 partenariats (52,8% contre 48,5% fin 2016), à savoir 6 337 agences postales, 2757 relais poste ;
- 8144 bureaux de poste : 504 MSAP, 922 bureaux facteur-guichetier, 481 bureaux quartiers prioritaires.
Le réseau des DOM est, quant à lui, composé de 255 points de contact dont 205 BP, 33 AP et 17 RP.
Ainsi, pour atteindre l’objectif des 17 000 points de contact, La Poste s’est tournée depuis quelques années vers les partenariats ; une façon de répondre à la fois à ses obligations mais aussi à la rentabilité qu’on lui demande. Mais un relais commerçant, une agence postale communale ou autres pseudo-bureaux ne rendent pas le même service. Les disparités et différentes formes de points de contact, n’offrant ni les mêmes services ni les mêmes horaires d’ouverture, créent une rupture d’égalité, remettant en cause le service public tout en fragilisant la pérennité des activités postales et bancaires.
Concernant « l’évolution du statut des points de contact», il est écrit dans ce nouveau contrat que l’offre de services postaux s’appuie sur la complémentarité des différentes formes de présence postale. Et les contributeurs de citer les sites de logistique urbaine et « pick-up services » et formes innovantes de type « espaces nomades ». Faut-il comprendre qu’une consigne où l’on vient récupérer son colis est un point de contact ?
Tous confondus, ils sont près de 11 000 à être éligibles au fonds de péréquation. Pour 2020-2022, la méthode de calcul et les systèmes de pondération mis en œuvre vont très significativement prioriser les DOM et les bureaux situés dans les QPV (Quartier Prioritaire de la Ville).
Maison France Services : quelle offre postale ?
A ce jour, La Poste détient 504 Maisons de Service Au Public, qui seront majoritairement transformées en Maisons France Service. L’objectif de l’état est d’en ouvrir 2 000 d’ici 2022. La part du fonds consacrée aux MFS est donc à la fois contrainte et vouée à prendre une proportion de plus en plus grande au sein d’un budget qui lui n’augmentera pas.
En créant les MFS, le gouvernement veut combler un « vide républicain » dénoncé, au travers des récentes frondes populaires, par une population exclue des services publics, que ce soit en milieu rural ou en périphérie des villes.
Officiellement prévues pour mieux répondre aux attentes des citoyens, les MFS sont soumises à des critères d’exigence : locaux adaptés, heures d’ouverture en adéquation avec les besoins, confidentialité ou encore formation spécifique des agents qui devront être deux par site et répondre en 72 h maximum aux citoyens.
Pour obtenir le label « France Service », il faudra proposer a minima les services relevant de 6 organismes : Caisse d’Allocations Familiales, Ministères de l’Intérieur, de la Justice, des Finances Publiques, Caisse Nationale d’Assurance Maladie, Caisse nationale d’Assurance vieillesse, Mutualité sociale agricole, Pôle emploi, et bien sur La Poste dont l’offre comprendra notamment les prestations suivantes : informer sur le bureau de poste le plus proche et ses horaires, renseigner sur les affranchissements disponibles, remettre des lettres et colis en cas de point de retrait au sein de la maison France Services, accompagner dans les contrats de réexpédition du courrier ou encore assurer la garde du courrier et les abonnements mobilité.
Toutes les prestations, notamment bancaires, ne seront pas assurées dans les MFS. Aussi, pour FO Com, l’initiative risque, une fois de plus, de ne pas atteindre l’objectif attendu. Déjà, en créant les maisons de service « AU » public en lieu et place de Maison de Service Public initialement prévues, l’État a changé l’esprit républicain de cette initiative. Ces maisons qui devaient assurer le service public se transforment davantage en « relais d’informations pour les citoyens » qu’en véritables services de l’État. Avec les MFS, l’histoire risque de se répéter….
Et demain, quel avenir pour le service public postal ?
Bien sûr, la désertification rurale, l’explosion des nouvelles technologies, l’évolution des modes de consommation, de déplacements font que le service public se doit d’évoluer. Qu’ils soient sociétaux, technologiques ou numériques, les besoins des citoyens changent. Cela ne veut pas dire qu’il faille les minimiser.
C’est la raison pour laquelle FO revendique depuis maintenant plusieurs années un état des lieux des services publics et un recensement des besoins pour redéfinir ce que doit être le service public de demain. Et cette redéfinition doit s’inscrire dans les valeurs de la République. C’est ce débat que FO réclame depuis des années : l’inventaire des besoins en la matière, que ce soit pour la Poste ou les autres services publics. Quelle que soit sa forme et son domaine, le service public doit être « partout, pour tous ».
Que l’on ait des craintes ou pas, la question centrale reste le financement. 177 M€ par an maximum : c’est le montant de la dotation du fonds de péréquation jusqu’à 2022. À ce niveau, la compensation financière reste certes stable depuis 2016, mais ce n’est pas le cas du coût réel de la mission, plus fluctuant et estimé supérieur par l’Autorité de Régulation des Communications électroniques et des Postes (ARCEP) et par La Poste elle-même. Une partie non négligeable de la mission de service public reste à la seule charge de l’entreprise. Cet écart était de 60M€ en 2018, une somme non négligeable dans les comptes de l’entreprise.
Ne pas financer le coût total du service public postal risque de transformer ce contrat en une liste de bonnes intentions. Or, dans le cas présent, c’est un investissement humain et républicain et non un luxe.
Les quatre missions postales que sont l’aménagement du territoire, l’accessibilité bancaire, la distribution de la presse et le service universel (distribution du courrier 6 jours sur 7) concourent à ce lien social dont on a (re)découvert la valeur et l’importance ces derniers mois. Au-delà du rôle social, ces missions sont également un levier de développement sans équivalent pour La Poste qui peut ainsi déployer à la fois son offre historique et ses nouveaux services.
Sans être ambitieux, le contrat de présence postale territoriale a le mérite de démontrer que l’Etat et les élus considèrent le service public postal comme indispensable. La commission départementale de la présence postale territoriale (CDPPT) au niveau local et l’observatoire au niveau national assurent la gouvernance de ce contrat. Pour la première fois, elle est renforcée par une mesure « satisfaction-clients-élus-partenaires ». Il est à souhaiter que cette gouvernance veille au respect de ce texte dans l’intérêt des citoyens-clients et de La Poste bien évidemment. Pour FO Com, il ne s’agit pas de se contenter d’un simple bâtiment avec un logo jaune mais bien d’un véritable service public, garant de l’égalité des citoyens et de la présence de la République sur tout le territoire. Transformer ne doit pas conduire à mettre en place une poste à plusieurs vitesses et sacrifier la qualité de service due à tous les clients sur tout le territoire. La nation a besoin d’un service public postal adapté et solide. La crise que nous venons de traverser nous l’a démontré à plus d’un titre.